Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je suis Florence Cols. Je suis juriste chez Droits Quotidiens depuis 13 ans et j’y suis devenue experte en langage juridique clair. J’ai une formation juridique et un diplôme complémentaire d’éthique biomédicale.

Je suis aussi maman de 2 enfants. J’aime beaucoup la nature, courir dans les bois, me déplacer à vélo, jouer et écouter de la musique.

J’ai depuis l’enfance cet idéal de justice en moi. J’ai besoin de savoir que je peux aider les gens et de trouver du sens dans mon métier. Faire du droit pour aider les gens et non faire du droit pour des tours d’ivoires. Pour la petite anecdote, j’ai recroisé récemment une professeure de maternelle qui m’a dit que cela m’allait bien de faire du droit, et que quand j’étais petite, j’étais allée voir les autres enfants en disant qu’on ne pouvait pas se moquer de la nouvelle car ce n’était pas juste 

Quel est ton parcours professionnel avant d’arriver chez Droits Quotidiens ?

Après mon Erasmus au Mexique, mon premier poste a été chercheuse à l’Ecole de Santé Publique à Bruxelles pour l’UCL. Je menais une recherche sur l’utilisation de données personnelles dans des études médicales.

J’ai également donné des cours d’éthique médicale à des infirmières et à des sages femmes, 1 jour par semaine dans une autre université à Namur.

Puis je suis partie vivre à Kinshasa 2 ans avec mon compagnon. J’y ai continué la recherche et les cours avec les universités belges et l’université de Kinshasa. J’ai aussi travaillé bénévolement pour une association congolaise sur les droits de l’enfant, avec des travailleurs sociaux congolais. Je me suis rendu compte que la recherche ne me correspondait pas, car je n’avais pas d’utilité sociétale. J’avais besoin de sens, de me sentir dans l’action et utile pour les gens qui en ont besoin. La recherche et le monde académique ne m’apportaient pas cela.

Quelles sont tes missions chez Droits Quotidiens Legal Design ?

Je revenais de Kinshasa et je cherchais un emploi. J’ai postulé un peu par hasard à une offre d’emploi de Droits Quotidiens. Et ça a fonctionné !  « Nous nous sommes  trouvés » m’avait dit à l’époque Didier Ketels, le CEO de Droits Quotidiens. J’y suis depuis 13 ans maintenant, et je m’y sens bien.

Mes missions chez Droits Quotidiens ont bien évolué. Au début, j’étais juriste généraliste. J’expliquais le droit aux citoyens et aux travailleurs sociaux en langage clair. Concrètement, je répondais aux questions des citoyens et des travailleurs sociaux, je rédigeais des articles et je donnais des formations. Puis, petit à petit, cela a évolué vers des missions de langage clair et de legal design.

Mes missions actuelles sont :

  • essentiellement des missions de copywriting : réécrire en langage clair des documents en fonction de leur public cible, pour les rendre clairs et utiles (donc repenser les documents, les restructurer, changer les formulations, etc.);
  • des coachings et des formations pour accompagner les autres professionnels à changer leur façon de communiquer les informations juridiques.

Comment t’es-tu formée au langage clair et au legal design ?

En le faisant ! Je n’ai pas suivi de formation langage clair.

A mon arrivée chez Droits Quotidiens Legal Info, cela s’est fait naturellement car je devais expliquer des informations à des travailleurs sociaux. Le langage clair s’est imposé pour leur faire comprendre des informations juridiques. J’avais naturellement cette attention particulière de rendre mes explications claires et accessibles.

J’ai en moi une partie des compétences nécessaires, comme la facilité à rédiger, l’esprit de synthèse, une empathie, une pensée utilisateur. Mais c’est vraiment en faisant que j’ai appris petit à petit, en participant à différentes missions et en m’inspirant d’expériences de collègues. Mon expérience de professeur m’a également appris à transmettre l’information, à la rendre accessible au public visé.

Peux-tu partager avec nous ta dernière mission avec le CPAS de Bruxelles ? Quels étaient les enjeux et qu’a concrètement réalisé Droits Quotidiens Legal Design ?

La demande du CPAS de Bruxelles était de réécrire des documents pour les rendre clairs et utilisables pour leur public.

  • Des documents pour les citoyens : les personnes qui reçoivent un courrier ou une décision du CPAS et qui ne comprennent pas pourquoi ils n’ont pas droit à l’aide.

J’ai réécrit ces documents en langage clair, puis on les a traduits en néerlandais. Cela représente environ une trentaine de courriers et 200 justifications de décisions.

  • Des documents internes rédigés par des chefs de service pour les travailleurs sociaux du CPAS (environ 20 documents de taille variable) expliquant, selon les types de demande d’aides, comment fonctionnent les aides santé et logement, qui contacter, comment remplir un rapport, comment faire une enquête sociale, comment bien mener un rendez-vous,  etc. Et repenser comment ces nombreuses informations peuvent être agencées et présentées autrement.

J’ai réécrit l’ensemble de ces documents.

L’enjeu pour le CPAS de Bruxelles est maintenant de réfléchir et de décider quel outil et quel support ils vont utiliser pour ces documents réecrits.

En interne, ils étaient convaincus de la nécessite de changer et j’échangeais avec des personnes qui étaient ouvertes et réactives. Ils étaient acteurs et c’était un réel plaisir de travailler dans ces conditions.

Quels constats fais-tu en termes d’avancée du legal design / langage clair chez les professionnels du droit aujourd’hui ? Quelles tendances vois-tu se dessiner ?

J’ai l’impression que cela évolue dans le bon sens, lentement mais dans la bonne direction. Il y a une véritable prise de conscience de l’apport du langage clair et des changements sociétaux, des attentes des citoyens, et de la nécessité de s’adapter. Le prestige que l’on a à ne pas être clair est révolu.

Je sens également moins de réticence quand je donne une formation : les juristes ne sont pas toujours d’accord, ils ne prennent pas tout ce que l’on propose mais ils l’expriment avec moins d’agressivité.

Encore beaucoup de professionnels pensent que faire du legal design c’est faire une présentation plus tape à l’œil, alors qu’en réalité c’est beaucoup plus que ça, c’est tout un changement d’état d’esprit. En un mot, c’est la faculté d’écrire en se mettant à la place de son lecteur et pas seulement faire une belle mise en page.

Quel conseil donnerais-tu à une personne qui souhaite se lancer dans le legal designet qui ne sait pas par où commencer? 

Je lui dirais de s’interroger en premier sur son intention : pourquoi le fait-elle et pour qui le fait-elle ? Est-ce qu’elle veut faire du legal design pour se faire bien voir, pour améliorer son image, sa réputation , pour avoir plus de clients ? Ou bien le fait-elle parce qu’elle veut que la personne qui la lise comprenne l’information et en fasse quelque chose ? Est-ce qu’elle veut vraiment améliorer sa communication et faciliter la tâche de la personne ?

Et dans un second temps, si elle le fait pour la personne, l’enjeu est de bien la comprendre,  de se mettre à sa place, l’interroger pour comprendre quels sont ses besoins d’information, sa logique de raisonnement, ses peurs, ce qu’elle sait déjà, etc. Bref, les fondamentaux du legal design : l’empathie et cette capacité à se mettre à la place de la personne pour qui on écrit.

Et puis enfin adapter la communication : choisir la structure, le support,  les mots, les phrases, bref appliquer toutes les règles de langage clair.

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Texte: Lydia Zunino

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