Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je suis Olivier Beaujean, j’ai 52 ans, je suis juriste et j’ai fait des études de droit et de communication. Au départ, je voulais être journaliste avant tout.
Je suis quelqu’un de curieux, porté sur l’humain. J’aime quand ça bouge, et d’ailleurs je fais beaucoup de vélo !
A la fin de mes études de droit, j’ai travaillé deux ans comme pigiste dans un grand groupe de presse. Au cours de ces deux ans, j’ai eu la chance d’être pendant huit mois chroniqueur judiciaire notamment auprès du tribunal correctionnel. Cela a été pour moi une véritable prise de conscience de l’incompréhension que les justiciables peuvent avoir de la justice, un monde artificiel bien loin des préoccupations réelles des gens. La place du pigiste est vraiment entre le pupitre du juge et les avocats.
J’ai par la suite travaillé comme juriste pendant un peu plus de trois ans dans un bureau de courtage assurance et de produits bancaires.
Puis j’ai intégré la Haute École de Namur-Liège-Luxembourg (Hénallux) en qualité de Maître-assistant chargé de la gestion juridique et administrative. C’était une nouvelle fonction juridique qui venait de se créer pour toutes les hautes écoles de Bruxelles. J’aimais particulièrement être en lien avec les étudiants et m’occuper de leurs cursus et également gérer les crédits européens. J’ai toujours aimé les situations humaines, j’ai toujours eu la curiosité des gens et de leurs histoires.
C’est d’ailleurs ce que j’aimais dans le journalisme, c’était raconter des histoires et je pense que l’on peut raconter des histoires par le droit car quand on a besoin du droit, c’est que « l’histoire a mal tourné ».
Enfin, en 2008, j’ai intégré les équipes de Droits Quotidiens qui étaient portées sur l’humain et sur des matières transversales qu’à l’époque je ne connaissais pas (notamment l’endettement). L’activité « langage clair » s’est développée : la réunion du droit et de la communication qui est complétement cohérente avec mon parcours professionnel.
Tu te partages entre formations, consulting et gestion d’une équipe. Peux-tu nous en dire un peu plus sur ton quotidien ?
Chez Droits Quotidiens, ma fonction est passée de « juriste référent petites équipes » à coordonner l’équipe opérationnelle de Droits Quotidiens Legal Info. Depuis 2 ans et demi, je suis en charge de développer l’activité Droits Quotidiens Legal Design. Cela implique à la fois de coordonner l’équipe et d’assurer la gestion financière, commerciale et opérationnelle, et de continuer à faire des formations. Je me vois comme un super chef de projet dans le sens ou j’ai toujours « un œil dans tout ».
Cela a aussi un côté très frustrant car je ne peux pas me consacrer autant que je voudrais au fond. Je survole beaucoup et j’aimerais avoir des dossiers que je gère de A à Z.
C’est très satisfaisant de coordonner une équipe de francophone, néerlandophone, et française. Ce qui est important dans l’équipe c’est l’échange et j’ai beaucoup d’expériences à partager.
Nous sommes sur plusieurs dynamiques avec des activités de formation, de copywriting, et une activité de rédaction de brèves avec Wolters Kluwer. Toute la difficulté est de jongler avec agilité entre toutes ces activités.
La fonction commerciale est ce qui est pour moi le moins évident. Mon objectif dans les prochains mois est d’ailleurs de recruter un commercial.
Qu’apportent ta formation et ton expérience en communication et journalisme à ta pratique et à ta vision du langage clair et du legal design ?
Ma formation de juriste m’aide car c’est important de savoir comment les juristes réfléchissent. Ce sont avec les juristes que nous travaillons et ce sont toujours les mêmes mécanismes en œuvre. Avoir cette facilité de « comprendre ce que le juriste veut dire » est un vrai plus.
Ma formation en communication me permet d’apporter des éléments utiles pour améliorer et enrichir la communication du juriste.
Je me souviendrais toujours du retour de l’assistant de la faculté de droit, Xavier Delgrange, désormais Premier auditeur, chef de section, auprès du Conseil d’Etat lors de la session de correction d’un travail individuel pendant mes premières années d’études de droit : « Quand je lis ton travail, j’ai l’impression de lire un travail journalistique, tu devrais plus utiliser un style juridique ». Sur le moment je l’avais mal pris mais c’était en fait un beau compliment car mon texte était juridiquement juste et il était facile à lire.
Quels constats fais-tu en terme d’avancée du legal design / langage clair chez les professionnels du droit en 2023 ?
Etant attentif au langage clair et au legal design depuis 2011, je note une évolution importante sur ces dix dernières années.
Je partage deux exemples :
- La fédération des notaires qui a réécrit beaucoup de documents et produit beaucoup d’outils en langage clair,
- L’Institut de Formation Judiciaire (IFJ) qui vient de créer en son sein une cellule « langage clair » pour accompagner les magistrats dans leurs communications (en ce inclus les courriers des greffes).
Faire prendre conscience aux universités de l’importance du langage clair et du legal design est pour moi l’enjeu des prochaines années car ces matières ne sont pas encore pas assez développées dans les formations initiales. Les études de droit en Belgique ont peu évolué, contrairement aux autres études. Les universités de droit fonctionnent encore beaucoup en silo.
C’est un vrai sujet car le jeune juriste est formaté quand il finit ses études ; changer sa façon de penser et de rédiger lui fait peur.
Quelles tendances vois-tu se dessiner en 2024 en matière de legal design?
Je note une tendance notamment dans les administrations à mieux communiquer, à être plus efficace. Je pense que les choses vont bouger significativement dans le secteur public.
Comment devenir un bon legal designer ?
La bonne recette c’est avant toute chose l’empathie, la curiosité, être curieux des autres, s’intéresser aux métiers de l’autre. Ne pas rester dans son petit texte, dans son petit syllogisme.
Vous réfléchissez à un projet legal design ou langage clair ?
Nous pouvons vous aider.